Code d'éthique et de déontologie
Code d’éthique et de déontologie des professionnels de l’information et de la communication issu des assises nationales de la presse congolaise tenues à Brazzaville du 25 au 28 octobre 2018
Préambule
Le droit à l’information ainsi que la liberté d’expression et de critique constituent des droits fondamentaux garantis par la Constitution du 25 octobre 2015, notamment en son article 25.
Ces droits s’exercent dans le cadre du présent Code qui a pour objet de fixer les droits et devoirs, ainsi que les libertés et responsabilités applicables à l’ensemble des professionnels de l’information et de la communication.
La mission de l’information et de la communication comporte des limites fixées par les lois et règlements en vigueur.
Les professionnels de l’information et de la communication ont le droit et le devoir d’informer le public des sujets d’intérêt général et non d’intérêt personnel ou particulier.
Le droit du public à connaître ces sujets d’intérêt général détermine la liberté et la responsabilité journalistique.
Seulement, dans la pratique de l’éthique et la déontologie, les professionnels de l’information et de la communication sont confrontés quotidiennement aux pressions de toutes formes venant des pouvoirs publics.
De même, la précarité des salaires des professionnels de l’information et de la communication les expose à la vulnérabilité, à la corruption et à toute autre mauvaise pratique.
- DES DEVOIRS
I.1. Informer dans le respect de la vérité
Les professionnels de l’information et de la communication doivent :
Article1 : S’assurer de la véracité des faits qu’ils rapportent au terme d’un rigoureux travail de collecte et de vérification des informations.
Article 2 : Rechercher et respecter la vérité en raison du droit du public à connaître celle-ci. Ils ne diffusent que des informations dont l’origine leur est connue. Dans la mesure du possible et pour autant que ce soit pertinent, ils font connaître les sources de leurs informations sauf s’il est justifié de protéger leur anonymat.
Article 3 : Les professionnels de l’information et de la communication doivent observer la plus grande prudence dans la manière de diffuser l’information et éviter toute approximation. L’urgence ne dispense pas les journalistes de citer (cf. art.1 et 2) et/ ou de vérifier leurs sources, ni de mener une enquête sérieuse.
Article 4 : Dans le respect des faits, les journalistes doivent distinguer soigneusement ce qui relève de leur opinion personnelle, de l’analyse et de l’information factuelle, afin de ne pas engendrer la confusion dans le public. Les journalistes s’en tiennent avant tout au compte rendu précis des faits. Dans les genres journalistiques comme l’éditorial, la chronique, le billet ou dans le journalisme d’investigation, où l’expression des opinions prend une large place, les journalistes doivent tout autant respecter les faits.
Article 5 : Respecter leur déontologie quel que soit le support, y compris dans l’utilisation professionnelle des réseaux sociaux, blogs et d’autres formes de TIC.
Article 6 : S’interdire de publier dans leurs journaux des articles non signés mis en ligne, sur les blogs, ou diffusés dans les réseaux sociaux.
Article 7 : Situer dans leur contexte les faits et opinions dont ils font état de manière à ce qu’ils soient compréhensibles, sans en exagérer ou en diminuer la portée. Ne déformer aucune information et n’en éliminer aucune essentielle présentée en texte, image, élément sonore ou autre.
Article 8 : Lors de la retranscription d’interviews, les citations, les rapprochements, les ajouts sonores, etc. ou leurs séquences ne doivent pas dénaturer le sens des propos recueillis.
Article 9 : Les rédactions rectifient explicitement et rapidement les faits erronés qu’elles ont diffusés par tacite reconnaissance ou selon les remarques formulées par les personnes concernées.
Article 10 : Les titres et la présentation de tout genre journalistique ne doivent pas exagérer ni induire en erreur le public.
Article 11 : Les faits sont contraignants et sacrés. Le commentaire, l’opinion, la critique, l’humeur et la satire sont libres, quelle qu’en soit la forme (texte, dessin, image, son, etc).
Article 12 : Les journalistes sont tenus de faire un bon usage de la liberté de la presse, sans entorse à la vérité. En leur qualité d’acteurs sociaux, ils doivent se conformer au principe d’imputabilité comme élément de leur légitimation par le public.
I.2 Informer de manière indépendante
Article 13 : Les journalistes préservent leur indépendance et refusent toute pression. Ils n’acceptent d’instructions que celles de leur hiérarchie rédactionnelle, ne sollicitent aucun avantage et n’en acceptent aucun qui mette leur indépendance en danger.
Article 14 : Les journalistes refusent les injonctions contraires à la déontologie journalistique, d’où qu’elles viennent. Ils ne sont tenus d’accepter aucune injonction contraire à la ligne éditoriale de l’organe d’information auquel ils appartiennent.
Article 15 : Les journalistes ne se comportent pas en auxiliaires de police ou d’autres services de sécurité. Ils ne sont pas autorisés à divulguer les informations placées sous le sceau du secret d’État, le déroulement des enquêtes de police et de l’instruction judiciaire. Ils ne sont tenus de transmettre que les éléments d’information déjà rendus publics dans leur média lorsque ces services les sollicitent.
Article 16 : La décision de publier ou non, intégralement ou en partie, des réactions émanant du public, de même que la gestion et la modération, de préférence à priori, des forums et des espaces de dialogue en ligne, relèvent en toute indépendance de la seule responsabilité de la rédaction. Celle-ci respecte le sens et l’esprit des propos rapportés.
Article 17 : Photos, graphiques, sons et images diffusés ou publiés doivent refléter le plus fidèlement possible la réalité. Les préoccupations artistiques ne doivent pas conduire à tromper le public. Les photomontages doivent être identifiés comme tels et ne peuvent être diffusées ou publiées.
I.3 Agir avec honnêteté, impartialité et loyauté
Article 18 : Les journalistes recourent à des méthodes loyales afin de recueillir et de traiter les informations, les photos, les images et tout autre document, etc….
Article 19 : Sont notamment considérées comme toutes autres méthodes déloyales : la dissimulation de sa qualité de journaliste, la provocation, le chantage, le harcèlement, la rémunération des sources d’information, etc.
Article 20 : Devant l’impossibilité d’obtenir l’information par de méthodes loyales, les journalistes peuvent la recueillir par tout autre moyen. Toutefois, les risques encourus par les journalistes et par des tiers restent proportionnés au résultat recherché.
Article 21 : Sont considérés comme incompatibles avec la dignité professionnelle :
- le sabotage ;
- la rétention de l’information ;
- la calomnie ;
- la diffamation ;
- l’injure ;
- l’atteinte à la pudeur ;
- le harcèlement,
- l’invocation d’un titre ou d’une finalité imaginaire et l’usage des moyens déloyaux pour obtenir des informations, des documents ou surprendre la bonne foi de quiconque ;
- la xénophobie ;
- le tribalisme ;
- l’appel à la haine tribale ou raciale ;
- l’incitation à la violence, à la division ou à la révolte;
- l’enregistrement clandestin des conférences de rédaction à des fins politiques ou autres.
- Le plagiat
- Le sexisme et les stéréotypes négatifs contre la femme
- Toute violation des droits de l’enfant
I.4. Respecter les droits de la personne et sa vie privée
Article 22 : Les journalistes respectent les convictions religieuses, politiques ou philosophiques du public, l’honneur et la dignité des citoyens, ainsi que leur vie privée et ne révèlent aucune donnée personnelle qui ne soit pas pertinente au regard de l’intérêt général.
Article 23 : Les journalistes tiennent compte des droits de toute personne mentionnée explicitement ou implicitement dans une information. Ils mettent ces droits en balance avec l’intérêt général de l’information.
Article 24 : Lorsque des journalistes ont diffusé des informations susceptibles de porter atteinte à la réputation ou à l’honneur d’une personne, les rédactions doivent lui accorder un droit de réponse.
Article 25 : Les journalistes doivent respecter la présomption d’innocence reconnue à toute personne interpellée par les services de police ou mise en examen par la justice. Toutefois, pour des cas de crime organisé ou d’acte de terrorisme, les journalistes traiteront l’information avec professionnalisme.
Article 26 : Les journalistes évitent de diffuser des informations des personnes éplorées, d’images attentatoires à la dignité humaine sauf ce qui est pertinent au regard de l’intérêt général.
Article 27 : Les journalistes sont particulièrement attentifs aux droits des personnes peu familiarisées avec les médias et des personnes vulnérables comme les mineurs ou les victimes de violence, d’accidents, d’attentats, etc. ainsi que leurs proches afin d’éviter les stéréotypes, la généralisation, l’exagération et la stigmatisation.
Article 28 : La publication des rumeurs soient-elles persistantes n’est pas souhaitée. Elles méritent d’être vérifiées par les journalistes qui doivent rechercher la véracité des faits auprès des sources crédibles, avant leur publication en tant qu’information.
Article 29 : Les journalistes ne prennent envers un interlocuteur aucun engagement susceptible de mettre leur indépendance en danger. Toutefois, ils respectent les modalités de diffusion qu’ils ont acceptées librement tels que l’embargo, le « off the record », l’anonymat… Ces engagements doivent être clairs et incontestables.
Article 30 : Les journalistes gardent secrète l’identité des sources d’information ayant requis l’anonymat.
I.5 Respecter les règles d’éthique
Article 31 : Respecter strictement la hiérarchie et les règles disciplinaires qui régissent la structure à laquelle ils appartiennent ou avec laquelle ils collaborent.
Article 32 : Les journalistes ne doivent pas porter atteinte à la confraternité par leurs écrits, ni en sollicitant la place d’un confrère ou de provoquer son renvoi.
Article 33 : Les journalistes refusent tout avantage matériel ou pécuniaire suscité ou non de la part d’un service, d’une personnalité car, la qualité du professionnel, son influence ou ses relations sont susceptibles d’être exploitées malhonnêtement. L’usage de la liberté de l’expression ne doit pas l’être dans une intention intéressée.
Article 34 : Les journalistes évitent tout conflit d’intérêts. Ils n’exercent aucune activité pour le compte de tiers si cette activité porte atteinte à leur indépendance.
Article 35 : Les journalistes ne prêtent pas leur concours à des activités de publicité ou de communication non journalistique. Les rédactions s’assurent que les messages publicitaires sont présentés de façon à éviter la confusion avec l’information journalistique. La citation de marques, entreprises, personnalités, événements, institutions ne répond qu’aux seuls critères journalistiques.
Article 36 : Les journalistes n’utilisent pas dans leur intérêt ou celui de leurs proches, l’information financière dont ils ont connaissance avant qu’elle soit communiquée officiellement au public. Ils s’interdisent toute forme de délit d’initié.
DES DROITS
II .1 : Libre accès aux sources d’information
Article 37 : Les journalistes ont droit d’avoir le libre accès à toutes les sources d’information et le droit d’enquêter librement sur tous les faits qui conditionnent la vie publique.
Article 38 : Les journalistes mènent des recherches et des enquêtes et informent librement sur tous les faits d’intérêt général afin d’éclairer l’opinion publique. Ils n’acceptent de se voir opposer le secret des affaires publiques ou privées que pour des motifs d’intérêt général dûment justifiés et à la condition que ces restrictions ne créent pas d’entraves injustifiées à la liberté d’information.
Article 39 : Tout journaliste professionnel doit être détenteur d’une carte de presse délivrée par l’autorité compétente donnant libre accès aux sources d’informations.
II.2 : Protection des journalistes
Article 40. Les journalistes ne reconnaissent que la législation en vigueur dans leurs domaines, les codes et chartes des organismes internationaux.
Article 41: Les journalistes ne peuvent être contraints d’accomplir un acte professionnel qui serait contraire aux normes et à l’éthique professionnelle. Dans ce cas, ils ont le droit de refuser toute subordination en recourant au principe de la clause de conscience.
Article 42 : Les journalistes doivent être obligatoirement informés de toute décision importante de nature à affecter la vie de leur organe.
Article 43 : Dans l’exercice de leurs fonctions, ils sont protégés par leur organe dont la responsabilité est engagée.
Article 44 : Les journalistes défendent dans leur activité une pleine liberté d’investigation, d’information, de commentaire, d’opinion, de critique, d’humeur, de satire etc…, selon la ligne éditoriale de l’organe, les choix éditoriaux et d’interlocuteurs.
Ils combattent les restrictions, les pressions ou les entraves ou les menaces qui visent à limiter l’exercice de leurs fonctions.
Article 45 : En considération de sa fonction, de leur honneur, de leur dignité et de leurs responsabilités, les journalistes ont droit non seulement à un statut approprié (secteur public) ou à une convention collective (secteur paraétatique ou privé), mais aussi à des mesures assurant leur sécurité matérielle, physique et morale, pour garantir leur indépendance.
Article 46 : Les journalistes sont responsables de leurs activités professionnelles, écrits, documentaires sonores et visuels, affiches même sous forme anonyme. Les pseudonymes sont autorisés et doivent être reconnus par l’employeur.
III. DISPOSITIONS DIVERSES ET FINALES
Article 47 : Les professionnels de l’information et de la communication ont le droit d’user du présent Code dans leurs rédactions à l’endroit des responsables des organes qui tenteraient de bloquer leurs droits ou d’influencer le traitement de l’information.
Article 48 : Les contrevenants au présent Code s’exposent aux sanctions prévues par les textes en vigueur.
Article 49 : Le présent Code, applicable dès la date de son approbation, sera affiché dans les salles de rédaction.
Article 50 : En cas de non-respect des termes du présent code par les tiers, les médias ou les professionnels lésés, peuvent solliciter l’arbitrage du Conseil supérieur de la liberté de communication.
Les participants